Porteurs de douceur active |
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Il faut s’y faire, l’appellation « modes actifs » est en train de remplacer « modes doux » pour désigner la mobilité à énergie humaine. Cette catégorie regroupe principalement la marche et le vélo, mais également les rollers, la trottinette, le skateboard et tout autre moyen n’utilisant que les muscles comme moteur.
Le mot « actif » se justifie donc parfaitement. « Transports doux » était trompeur, parait-il. Il faisait un peu trop mou. En ces temps où la suralimentation et l’absence chronique d’effort physique commencent à se voir de façon éclatante dans les profils de nos concitoyens, il peut s’avérer judicieux de mettre l’accent sur cette qualité dont sont porteurs ces modes de déplacements.
Pourtant, s’il est vrai qu’il est urgent de réhabiliter la dépense énergétique du corps au quotidien, avec tous ses bienfaits induits, notre société a également un grand besoin de douceur. En effet, la tendance ne va pas trop dans ce sens. Aujourd’hui, l’égoïsme semble à l’honneur. Les principes altruistes, bien souvent religieux ou idéologiques, sur lesquels ont été fondées nos sociétés, semblent bien passés à la trappe. « Trop bon, trop con ». Voilà bien une expression qui reflète cette triste réalité et qui est plus souvent mise en avant que « la liberté des uns s’arrête où commence celle des autres », comme je l’entendais dans ma jeunesse.
Alors, nous avons le choix, entre le premier ou le deuxième des deux principes énoncés ci-dessus, et ceci dans notre quotidien, dans tous les domaines. Y-compris dans la mobilité, douce ou active, ou les deux. Et lorsque nous avons choisi ce mode de déplacement plus en harmonie avec l’homme et la nature, et que nous souhaitons participer à son développement, nous pouvons également préférer un moyen d’action ou un autre. Il y a la revendication pure et dure. Elle est nécessaire, car elle est souvent le seul moyen de ne pas laisser la voiture envahir tout l’espace. Mais elle peut facilement dériver vers le militantisme agressif et égoïste. Utiliser l’idéologie cycliste ou écologique pour agresser autrui présente l’inconvénient d’exacerber les tensions, ce qui serait dommage dans notre cas. En effet, l’augmentation des modes doux apaise l’ambiance dans les villes, c’est une très bonne chose. Mais ce n’est pas le cas lorsque cela se traduit par des conflits permanents entre les différentes catégories. Automobilistes contre cyclistes, cyclistes contre piétons, rollers contre poucettes. Ça peut devenir l’enfer.
Non, définitivement, nous devons éviter cela et réhabiliter la douceur, l’écoute, la compréhension, voire l’empathie. Parce qu’après tout, la plupart des cyclistes et des piétons sont également automobilistes. Nous autres cyclistes pouvons voir les automobilistes comme de méchants envahisseurs égoïstes qui ne nous laissent pas suffisamment de place. Nous pouvons également les considérer comme des cyclistes potentiels qui n’ont pas eu, comme nous, la chance de mettre en œuvre dans leur vie ce mode de déplacement doux et actif au quotidien. Cela nous apporte du plaisir, de la bonne humeur, la santé… C’est une sacrée bénédiction pour nous que la vie nous ait permis de le découvrir. Nous avons tous tout à gagner à le faire savoir ainsi.
Houlà ! Je vois venir les commentaires à la lecture de ce texte : Je suis un doux rêveur, un utopiste.
Ce n’est pas faux. Mais, il y a vingt ans, oser rêver d’un développement des valeurs écologiques et du vélo en particulier faisait passer pour ce type de personne. Et aujourd’hui, c’est accepté.
Alors, pourquoi ne pas s’autoriser à rêver ainsi l’augmentation de l’altruisme et de la compréhension de l’autre. C’est cela, être porteur de douceur active…
Bonne route, à vélo !
Hervé BELLUT
Directeur de l’Organisation Bus Cyclistes
Consultant en mobilité douce https://www.B2Cycle.fr
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